Accès au crédit agricole : Un parcours de combattants pour les femmes au Burkina

« Faciliter l’accès au crédit agricole pour l’autonomisation des femmes au Burkina Faso ». C’est sous ce thème qu’un groupe de chercheurs, sous la conduite du Dr Yaya Ky, enseignant-chercheur à l’Université Thomas Sankara (UTS), a mené des réflexions pour trouver des solutions aux contraintes d’accès au crédit agricole des femmes. Il s’agit du Dr Al-mouksit Akim de l’Université Mohammed VI Polytechnique (Maroc), Dr Modeste Dayé du CARDES, un centre de recherche privé au Burkina Faso, Dr Habi Ky de l’Université de Ouahigouya, Fatimata Clarisse Ouattara et Diane Larissa Yili du ministère de l’Agriculture. Ce projet d’étude a été financé par un réseau international de chercheurs dénommé Politique économique et partenariat (PEP).

Dr Yaya Ky, enseignant-chercheur à l’Université Thomas Sankara (UTS)

Au Burkina Faso, l’on constate une répartition inégale des ressources entre les travailleurs. Que ce soit ceux du privé comme du public, ceux du secteur formel ou du secteur informel. Cette iniquité cause des dommages considérables surtout aux acteurs du monde rural. En effet, les agriculteurs rencontrent des difficultés pour obtenir des crédits afin de mener à bien leurs activités. La difficulté est encore plus criarde lorsqu’il s’agit des femmes, c’est tout un parcours de combattants. Selon l’Institut national des statistiques et de la démographie (INSD), en 2014, plus de 93 % des femmes burkinabè travaillaient dans le secteur agricole, mais seulement 5 % avaient accès au crédit. Ce qui limite leur productivité. Une situation qui n’est pas favorable au développement socioéconomique du pays des Hommes intègres quant on sait que les femmes plus de la moitié de la population.

Cette étude a permis de faire une analyse des questions d’accès au crédit afin de mesurer leur impact sur le bien-être et la productivité des ménages agricoles, en fonction des différents niveaux de contrainte de crédit. Selon Dr Yaya Ky, la contrainte de crédit se mesure par un indice à trois niveaux. Il s’agit des personnes pouvant demander le crédit et l’obtenir (catégorie peu contraint), des personnes pouvant demander le crédit sans l’obtenir (catégorie moyennement contraint) et des personnes ne pouvant pas demander le crédit (catégorie très contraint). Pour l’enseignant-chercheur, les résultats démontrent que c’est en favorisant  l’accès au crédit pour les femmes agricoles de la 2e catégorie (moyennement contraint) que l’on maximise l’impact du financement sur le bien-être des ménages bénéficiaires et la productivité agricole. « L’accès au crédit permet d’acheter des intrants de qualité, d’augmenter la superficie de production et de payer des ouvriers » a-t-il ajouté. Cependant, précise-t-il, ce résultat est conditionnel à ce que les dynamiques internes du ménage ne contreviennent pas à l’utilisation du financement par la femme.

En effet, les femmes sont confrontées à plusieurs obstacles dans leur demande de crédit. Il s’agit notamment de la garantie et de l’accord du conjoint. Aussi, il y a la gestion même du crédit qui peut poser problème. L’autre aspect de l’étude a permis de faire une évaluation des options politiques pour les décideurs afin de trouver des solutions à ces contraintes  d’accès au crédit pour les femmes.

L’étude a évalué 4 options de politiques mais recommande la troisième. La première option est le statut quo, c’est-à-dire le maintien des programmes actuels, sans modifications. La deuxième est l’éducation financière des deux conjoints par la formation  et la sensibilisation à l’accès au crédit. La troisième consiste à la mise en place d’un fonds de garantie de crédits agricoles avec un « quota genre » de 60% au profit des femmes, combinée à une éducation financière (l’option recommandée). La dernière, quant à elle, est la mise en place de l’assurance agricole avec un quota genre de 60% et une éducation financière pour limiter les risques agricoles.

Issouf Tapsoba

Latrinunedufaso.net

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