Rapport 2020 d’Amnesty international : Quand la Covid-19 fait accroitre l’atteinte des droits humains

Le rapport mondial annuel 2020/21 de l’Organisation non gouvernementale (ONG) Amnesty international a été présenté le mercredi 7 avril 2021, à Ouagadougou, au cours d’une conférence de presse animée par Yves Boukari Traoré, Directeur exécutif de l’ONG au Burkina Faso ; Moussa Ouédraogo, Coordonnateur de l’ONG, chargé de l’éducation en droits humains et Fatimata Ouédraogo, Coordonnatrice jeunes et genre de l’ONG. Présenter globalement le document, dresser l’état des lieux des droits humains au Burkina Faso et formuler des recommandations aux Etats et gouvernements africains ont été les grands points de cette conférence de presse.

La situation des droits humains en 2020 dans le monde a été abordée par Yves Boukari Traoré, directeur exécutif d’Amnesty international Burkina. Il a fait savoir dans sa présentation que les droits humains sont de plus en plus bafoués par la majeure partie des gouvernements. Et a voulu pour preuve, les mesures prises dans le cadre de la lutte contre la pandémie du Coronavirus, « la réponse à la pandémie a été instrumentalisée par les dirigeants qui ont impitoyablement utilisé la crise covid pour lancer de nouvelles attaques contre les droits humains », a-t-il soutenu, ajoutant que « les réponses à la pandémie apportées par les dirigeants ont été marqués par l’opportunisme, le mépris total des droits humains », a-t-il dit en sus. Outre ces manquements, il évoque des cas de violences policières desquelles il estime un accroissement dans ladite période. En guise d’illustration, M. Traoré cite le cas de la Philippine, pays où le président a donné l’ordre aux policiers de tirer à vue sur toutes personnes voulant perturber le système de mesure de quarantaine mis en place ; l’intensification de la violence policière au Brésil dont on dénombre au moins 3 181 personnes tuées sur la période de janvier à juin 2020 soit une moyenne de 17 morts par jour.

Le Coordonnateur chargé de l’éducation en droits humains de l’ONG, Moussa Ouédraogo, a évoqué la situation des droits humains dans la zone Afrique. Il a d’emblée indiqué que le présent rapport a pris en compte 35 pays africains dont l’Afrique au sud du Sahara en majorité. A en croire la suite de son propos, les conflits armés et la pandémie ont été des vecteurs clefs dans le non-respect des droits humains dans la zone Afrique. « Dans la plupart des conflits en Afrique, les Forces de défense et de sécurité (FDS), les groupes armés et les milices ont commis des atrocités contre les populations civiles en toute impunité. Les groupes armés ont décapité des civiles, incendié des maisons, pillé des villages et enlevé des femmes et des filles tandis que les Forces de sécurité ont arrêté, torturé et soumis à des disparitions forcées ou à des exécutions extrajudiciaires des membres et sympathisants présumés des groupes armés », a-t-il laissé entendre. Il fait également savoir que le rapport de la zone Afrique renseigne que la pandémie à coronavirus a accentué les discriminations et cela, a été ressentie par les politiques discriminatoires décidées par les dirigeants de la région Afrique à l’endroit des femmes, des personnes âgées, des personnes réfugiées qui étaient déjà des personnes marginalisées.

Il note de même, durant la période du couvre-feu et le confinement, décidés par les États pour contrer la pandémie, une augmentation du nombre de violence conjugale. « En Afrique du Sud, 21 femmes ont été tuées par leurs partenaires intimes et au Nigéria, 3 600 cas de viol ont été enregistrés pendant le confinement. », a-t-il cité. Terminant sur une note positive et d’encouragement, il a attiré l’attention sur des avancés en matière de droits humains dans des pays comme le Soudan où une nouvelle loi a été votée pour lutter contre les violences faites aux femmes, où l’on a procédé à l’érection en infraction des mutilations génitales féminines ; et en Sierra Leone, où il y a eu la levée de l’interdiction faite aux jeunes filles enceintes de poursuivre leur scolarité et de passer les examens scolaires.

Fatimata Ouédraogo, coordonnatrice jeunes et genre de l’ONG, a, pour sa part, fait cas des droits humains au Burkina Faso. Selon sa lecture du rapport, de nombreux cas de non-respect des droits humains sont enregistrés au Burkina. Elle met à l’actif du Burkina Faso, le non-respect du droit à l’éducation avec la fermeture d’environ 3 000 établissements scolaires pour des raisons de sécurité (en s’appuyant sur des données de l’UNICEF) ; des exécutions extrajudiciaires avec l’arrestation et l’exécution de 31 personnes le 9 avril, à Djibo, par des membres du Groupement des forces antiterroristes (GFAT) lors d’une opération. En plus de ces manquements, la coordonnatrice jeunes et genre évoque aussi la restriction de la liberté d’expression et de réunion ; l’incendie du véhicule du journaliste d’investigation du Courrier confidentiel, Yacouba Ladji Bama et l’interdiction ‘’arbitraire’’ du conseil municipal de Ouagadougou d’un sit-in devant le Palais de justice, organisé par le Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés (CISC).

Les conférenciers ont par ailleurs formulé des recommandations à l’endroit des États africains pour le respect des droits humains. Ils ont d’une part invité, les États africains à veiller à ce que les FDS agissent dans le respect des normes internationales relatives aux droits humains concernant le recours à la force et à l’utilisation des armes à feux ; au respect des droits à la liberté d’expression, la liberté de réunion pacifique, à la liberté de toutes les personnes détenues arbitrairement ; à diligenter sans délais des enquêtes efficaces et transparentes sur les allégations de recours excessif à la force face à des manifestants ; à traduire en justice les auteurs présumés de ces actes et faire en sorte que les victimes aient accès à la justice. Et d’autres part, à mettre fin aux harcèlements et aux manières d’intimidation visant les défenseurs des droits humains ; à libérer immédiatement et sans conditions ceux qui sont détenues en raisons de leur liberté d’expression ; au respect de la liberté de la presse ; à veiller à ce que les médias soient libres de fonctionner en toute indépendance et à ce que les professionnels de ce secteur puissent mener leur activité sans intimidation ou de harcèlement et sans avoir à craindre des représailles.

En rappel, le rapport mondial annuel 2020/21 d’Amnesty international fait la synthèse de la situation des droits humains dans le monde, en Afrique et au Burkina Faso. Un document de 500 pages, qui rend compte de la situation des droits humains en 2020 dans 149 pays et inclut cinq résumés régionaux ainsi qu’une analyse mondiale. Il présente les principaux motifs d’inquiétude de l’Organisation non gouvernementale (ONG) et appelle à l’action les gouvernants et d’autres acteurs.

Tiba Kassamse Ouédraogo
Latribunedufaso.net

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