Affaire charbon fin : L’expert douanier du parquet est à la barre

L’audience sur l’affaire charbon fin opposant l’Etat burkinabè à la société minière IAMGOLD Essakane SA s’est poursuivie le mardi 28 novembre 2023 au Tribunal de grande instance de Ouaga 1.

Ce jour, l’audience reprend en l’absence du Directeur général d’Essakane qui s’est fait représenté par la directrice pays par intérim. C’est donc cette dernière qui s’est présentée à la barre pour répondre aux différentes questions du ministère public. 

Le président du tribunal, pour commencer, a donné la parole au ministère public, qui est revenu sur la question relative à la quantité de charbon fin exportée par Essakane en 2015 et en 2016. Pour lui, les quantités déclarées étaient en dessous de celles réellement exportées. 

Selon la directrice pays par intérim d’Essakane, les quantités ne posaient aucun problème car il s’agit d’estimation. « Il est possible qu’ il y ait des variations mais c’est ce que le raffineur déclare que nous considérons. C’est une marge d’erreur. Et après, avec les variations trouvées par le raffineur, nous faisons une conciliation », a-t-elle répondu. A l’ écouter, le cas dont parle le ministère public concerne juste le nombre de conteneur qui n’a pas été respecté parce qu’il y avait un surplus dans un des conteneurs et cela ne joue pas sur le poids total. 

« Pour nous, la déclaration des poids est importante. Cela va permettre à l’Etat de bien défendre ses droits de pouvoir suivre les opérations », a rétorqué le parquet.

Après son intervention, le président a appelé à sa barre, un expert douanier requis par le parquet. Celui-ci, une fois devant la barre, a fait une projection d’éléments nouveaux dans l’affaire. En effet, il a confirmé les dires du procureur en expliquant à l’audience que suite à des recherches et renseignements il a trouvé une cotation de Bolloré sur laquelle Essakane demandait à exporter 629t de charbon fin. Donc pour lui, si les deux parties Essakane et Bolloré l’ont validé, c’est la preuve qu’ il s’agit bel et bien de la quantité réelle exportée au lieu de 399t.

Après la présentation de l’expert douanier, le président a demandé aux parties si elles avaient des questions ou observations à faire. 

La défense, répondant par l’affirmative, a fait observer que Essakane a une autorisation d’exportation de l’or et ses dérivés et laquelle autorisation a été octroyée par le ministère. Pour elle, l’expert doit parler de la cargaison de 2019 et non celles dont il fait cas parce qu’Essakane a déjà payé les surplus après la conciliation (NDLR, pour les expéditions de 2015 et 2016).

Selon l’expert douanier, Essakane a demandé en 2015 à exporter la moitié de 447t soit 223t alors que ce qui a été déclaré à la douane est 399t. Donc pour lui, Bolloré aurait dû attirer l’attention d’Essakane ou le dénoncer parce qu’il n’est pas en règle. En plus il a expliqué qu’en 2016 Bolloré n’utilisait pas de poids bascule certifié, donc les résultats ne sont pas fiables. En plus de cela, a-t-il ajouté, l’autorisation d’Essakane disait qu’il avait besoin d’exporter le charbon fin pour payer un incinérateur alors que le surplus de 2015 à lui seul permettait de l’acheter.

Face à Cela, Bolloré affirme que c’est en 2018 que le gouvernement burkinabè a pris une mesure pour dire que les marchandises devraient être pesées. Le principe du pesage des marchandises au Burkina n’a été rendu obligatoire qu’en 2019.

L’Etat burkinabè a également pris la parole ce jour. Ses questions concernaient la forme sous laquelle le charbon devrait être exporté selon la réglementation. Aussi, l’avocat de l’Etat voudrait savoir si l’expert douanier a eu des réponses favorables durant ses enquêtes. A cela, l’expert a souligné que selon la réglementation, c’est seulement sous forme de lingots, de barres et de pièces que l’or peut être exporté du Burkina. Pour la communication des résultats des quantités finales, selon l’expert, Essakane n’a pas voulu communiquer là-dessus. 

Quant au conseil du REN-LAC, lui s’est intéressé à la réglementation douanière, ce qui doit être fait, comment les contrôles s’effectuent, et les conséquences d’une fausse déclaration. 

En réponse à la première question, l’expert douanier a expliqué qu’en principe, sauf si l’agent de douanes commis à cette tâche n’a pas une bonne maîtrise du produit, il doit vérifier physiquement le produit pour s’assurer vraiment de sa nature. Deuxièmement, il se rendrait ainsi compte si le charbon contient de petites proportions d’or. Pour ce qui est du contrôle du poids, il a souligné que ce n’est pas obligatoire à tous les niveaux mais que selon la nature du produit cette obligation peut s’imposer. « C’est le système informatique qui décide et ça peut vous autoriser à passer ou à revérifier le poids avant de continuer », a-t-il laissé entendre. Il a également démontré qu’une différence de poids n’a aucune incidence sur les droits de douane si le produit n’est pas taxé. Mais que la fausse déclaration est néanmoins une infraction très grave en droit des douanes. « Il y a obligation de déclarer même si c’est pas payant au risque d’en courir la saisie et confiscation de la marchandise », a-t-il indiqué. 

Après ces différentes interventions, le président du tribunal a suspendu l’audience pour être reprise le jeudi 30 novembre 2023.

Issouf Tapsoba Nabintou Ouattara (stagiaire)

Latribunedufaso.net

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